Villers-lès-Nancy. Boulevard de Baudricourt. Là, on flirte avec mon enfance. Mais pas seulement. Mes grands-parents étaient aussi de ce "bas de Villers". Là qu'ils se sont rencontrés. Elle venait de plus loin, du coin de Dabo, la Moselle qui se déguise en alsacienne même si elle ne veut pas en entendre parler. Elle vivait aux cités Senn depuis 1934. Mon grand-père, mon arrière grand-mère et mon arrière grand-père, même, habitaient là, au boulevard de Baudricourt, au-dessus de l'actuelle et renommée pâtisserie Musquar, en face des cités. C'est pour ça qu'ils se sont rencontrés... Moi, gamin, j'habitais tout près de là aussi. Boulevard Cattenoz. A quelques encablures. Et combien, avant mes dix ans, j'avais déjà arpenté, sur mes p'tites guiboles, ces quelques rues, entre l'école du Placieux et les cités Senn... où vivaient des copains... où avant avaient tant vécu mes aïeux... c'est toujours avec émotion que j'y chemine clandestinement, en me sentant à la fois un étranger, celui du temps qui a passé, et foutrement indécrottable minot produit de ce quartier.
Ma grand-mère, dans les années quarante, passait parfois la tête par une de ces fenêtres. Quand elle était une adolescente en pleine guerre... dans les cités Senn...
Tiens, le bâtiment des cités Senn côté Haussonville est fermé et promis à la destruction. Ça me fait quelque chose; gamin, j'avais des copains qui vivaient là. Pis en même temps c'est comme ça. Je ne suis plus d'ici depuis longtemps. "Et c'est normal", chantait le gars Ferrer... l'ambivalence, ça doit être un truc comme ça.
C'est très extrapolé, mais j'y pense toujours en l'entendant, celle-là...
(photos du 7 juin 2010)
C'est très extrapolé, mais j'y pense toujours en l'entendant, celle-là...
"Il n'est pas question ici
De parler d'appartenance
Car c'est bien du béton pourri
Comme dans toutes les résidences
Mais j'y ai bien trop de souvenirs
Cette rue a fait mon avenir...
[...]
Paraît qu’un jour ils veulent la détruire
Mais faudra d’abord qu’ils passent sur le corps
De 250 loubards en cuir
Qui sont tous prêts à y laisser leur mort
Et moi je serai là jusqu’au dernier
Avec dans la main un pavé
Dans cette rue qui m'a fait comme je suis
Un sale con mais pas un pourri
Si un jour le soleil s’éteint
Si un jour le monde s’écroule
Si un jour la terre n’est plus rien
Qu’une bande de poivrots, d’hommes saouls
Il restera encore cette rue
Grande fière et debout
Où tu seras toujours le bienvenu
Et où j'veux y creuser mon trou "
De parler d'appartenance
Car c'est bien du béton pourri
Comme dans toutes les résidences
Mais j'y ai bien trop de souvenirs
Cette rue a fait mon avenir...
[...]
Paraît qu’un jour ils veulent la détruire
Mais faudra d’abord qu’ils passent sur le corps
De 250 loubards en cuir
Qui sont tous prêts à y laisser leur mort
Et moi je serai là jusqu’au dernier
Avec dans la main un pavé
Dans cette rue qui m'a fait comme je suis
Un sale con mais pas un pourri
Si un jour le soleil s’éteint
Si un jour le monde s’écroule
Si un jour la terre n’est plus rien
Qu’une bande de poivrots, d’hommes saouls
Il restera encore cette rue
Grande fière et debout
Où tu seras toujours le bienvenu
Et où j'veux y creuser mon trou "
(photos du 7 juin 2010)
10 commentaires:
Z'avez été enfant de choeur à Sainte-Thérèse, m'sieur Jones ?
Quelles belles façades!
Merci Elsa!
M'sieur Pop, j'suis même pas baptisé... avec mes parents grailleurs de curetons, c'eût été complexe d'être enfant de chœur... En particulier mon père, qui contrairement à am mère, reste indécrottablement virulent à ce sujet. Mais étant ch'tiot, comme des copains allaient au cathé, j'ai réclamé à y aller aussi. Mes parents ont fait la grise mine. Mais ont accédé à ma demande. Nous avions rencontré le cureton de Sainte-Thérèse. Lequel, apprenant mon statut de non-baptisé, a en ma présence affirmé que je ne pouvais prétendre à la curiosité, fut-ce de la religion qu'il professait lui-même. J'ai compris la leçon et j'en garde comme une rancune tenace envers curetons, pratiques diverses et variées, y compris en termes de confessions...
Je suis assez d'accord avec vous et votre papa. On a beau être tolérant, il y a une forme de rejet de l'embrigadement qui ne disparaît sans doute jamais. Ma question était au départ un clin d'oeil, vu que j'étais en train de lire ici quand vous avez manifesté votre enthousiasme au sujet de l'Alice de Woody Allen et donc du caractère sexy des catholiques repenties : Baudricourt évoquant (entre autres aspects) la paroisse Sainte-Thérèse (même le bistrot du quartier s'appelait Sainte-Thérèse, de mémoire), j'y ai vu assez bêtement un cri du choeur.
Le lien était d'une certaine manière aussi ténu que criant.
Notons, en parlant de cris, que le bar, dont l'ancien nom m'échappe aussi -on n'y voulait pas de moi étant gamin, bien qu'aujourd'hui, je n'en éprouve, loin de là, pas la même rancune qu'avec les curés...-, notons, disais-je, qu'il est aujourd'hui une banque. Comme le bar des Oliviers, en bas du boulevard Cattenoz, au croisement avec la villaroise avenue de la Libération et le boulevard Emile Zola.
Il est des changements qui peuvent m'attrister sans me révolter (je repense à m'sieur Nino), mais là, tout de même, des banques... ah, inspiration grecque, que ne me saisis-tu point?
Le bistrot s'appelait "café Sainte-Thérèse", ça me revient avec certitude, c'était peint en lettres 1950 à même la façade verte, au-dessus de la porte vitrée. A l'intérieur, c'était rideaux, plantes vertes, carrelage et formica, avec des vieux, seulement des vieux. J'ai dû y entrer une ou deux fois au début des années quatre-vingts, c'était pas à mon goût, les bistrots proches de Chopin étaient mieux, y avait des filles, de la musique et des babys. Pour le bar des Oliviers, ma brève fréquentation (trois-quatre fois, pour rejoindre des gens du quartier) date des années quatre-vingt-dix. Un endroit sympa, à l'époque.
Au fait, pourquoi autant de banques, alors que les gens sont raides et que le pognon liquide a quasiment disparu ?
bien que le pognon, devenu éthéré et pur de toute souillure prolétarienne, a besoin de lieux où planer sans complexes...
Ah ah ah près de Chopin, je trainais à un moment à celui au coin de la rue Pasteur, mais ça m'a vite passé, je voyais trop les mêmes têtes que toute la journée, et j'allais au bar pour changer d'air. Je m'étais replié à la fin de 1996 si je me souviens bien vers l'Aristide où y'avait moins de lycéens. J'ai même été un peu au PMU qui fait l'angle Blandan-Painlevé. On m'y regardait bizarre, mais au moins j'étais sûr d'être isolé de mes congénères.
Mais en ces années-là, j'habitais officiellement à Tomblaine, depuis 1993, même si finalement je passais en pratique plus de temps aux alentours de Chopin chez les copains, en particulier côté Gabriel Mouilleron et Croix de Bourgogne, avec un peu de Sainte-Marie et de Jean Jaurès. Ça me décentrait de mon Baudricourt d'enfance. Mais à travers mes potos, c'était aussi mon/mes quartier(s), la Croix de Bourgogne et consorts, merde!
Je me suis jamais fait à Tomblaine... trop loin des copains.
C'était un beau soir, comme le sont tous les soirs en Lorraine, il me souvient seulement qu'il faisait froid et qu'il était tard. Nous sortions probablement du cinéma et rentrions dans notre HLM, rue de Louvain à Vandoeuvre, juste derrière le centre commercial Montet-octroi, celui dont la pharmacie est explosive !
Notre 4L était sur le bd d'Haussonville, et comme les sens interdits étaient très différents d'aujourd'hui, nous étions le long de cette cité, prêts à passer le long du hideux Monop.
Quand soudain un bolide surgit à notre gauche, sortant de la rue du Placieux.
Choc violent. Le bolide mit un temps qui nous paru infini pour faire un tête-à-queue et se retrouver devant nous, sur le toit au beau milieu du carrefour juste devant ta photo 5, celle du NA (les milieux de carrefours ne sont-ils pas toujours beaux ?), exhibant ses dessous sexy.
Long silence et temps qui nous parut interminable avant que le chauffeur du véhicule (une ami 6 ?) qui nous avait grillé la priorité s'extirpe difficilement par la fenêtre de sa portière. Le second occupant sortira avec plus de difficultés, mais les 2 occupants seront indemnes !
Pin-pon : arrivée d'une voiture de police, prévenue par un habitant du coin. Constats. Dégagement de la chaussée par la maréchaussée, (les flics retournent le véhicule, sans ménagements pour le côté intact !) et chacun repart… de son côté !
C'était en 1969 ou 1970.
Seul détail à notre charge mais qui n'a pas été relevé : c'est que dans la semaine, avait été effectué un changement de sens de circulation autour du Monop' : un sens interdit ayant été subrepticement installé les jours précédents (nous l'ignorions !), et nous aurions dû rouler plus lentement afin de négocier un virage sur notre droite et passer entre le dit Monop et ladite cité… mais cela n'aurait peut-être rien changé...
Ta grand-mère a peut-être entendu le choc, l'arrivée de la police… et si c'était elle qui avait appelé les secours ? Il est peu probable qu'elle s'en souvienne, mais moi, quand on passe là, ce qui est assez fréquent, c'est un mauvais souvenir de notre unique accident sérieux !
Décidément, ce coin-là évoque pas mal de souvenirs. Juste pour chipoter, nous préciserons que le hideux Monop était à l'époque un hideux Prisu.
Il avait d'ailleurs une particularité rigolote : au premier étage, ouvert aux clients à l'époque, il y avait un tapis roulant qui commençait derrière les caisses et se terminait en bas, pour que lesdits clients n'aient pas à porter leurs emplettes dans l'escalier.
En effet. Je suis heureux d'ailleurs de cette profusion de souvenirs...
Non, ce n'est pas elle qui a appelé les secours, elle vivait depuis un moment à Buthegnémont, le quartier en haut de l'avenue de Boufflers. Elle a quitté le quartier en 1948, y a vécu à nouveau épisodiquement vers 1954-1955, avant de repartir. Par contre, les parents de son (ses!) mari(s) vivaient toujours boulevard de Baudricourt, jusqu'à leur mort au début des années 80.
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