mardi 25 novembre 2008

Ruelle Villa Verdier


La ruelle Villa Verdier, à Nancy. Je la traversais tous les matins, deux années durant, quand j'habitais le coin avec son vieil atelier désaffecté et au débouche son "garage à pneus", avant de passer sous la rampe de la VEBE et d'arriver pour traverser la Pépinière, juste à l'heure où le gardien ouvrait, et après un salut habituel, j'étais le premier à y mettre les pieds. J'aimais bien. Puis, direction la gare, et le boulot. J'aimais moins.



J'avais gribouillé un truc y'a des années avec une scène incluant la ruelle Villa Verdier...

Je m’engage sur la gauche, au-delà des containers à poubelles, dans la ruelle étroite et miteuse qui va me permettre de rallier la rue donnant sur la Vieille ville. Mes pas résonnent entre les murs, et les fenêtres noires, murées pour certaines, me surplombent, reflets du vide de mon esprit. Ce n’est qu’au bout de la ruelle, longeant un entrepôt à l’abandon, lui aussi muré de toutes parts, que je commence à m’éveiller. [...] je regarde avec une avidité soutenue, comme tous les jours, ces fenêtres aveuglées de parpaings. Je rêve dans deux époques en même temps. Je rêve de l’époque où à la même heure, des centaines d’ouvriers envahissaient déjà le quartier, où les cafés étaient ouverts et déjà animés, où les sirènes des usines le long du canal retentissaient. Je rêve à tous ces hommes, à la sociabilité qui les animait, aux combats aveugles qu’ils menaient parfois.

Mon pas résonne dans cette ruelle vide, aucun autre pas n’y répond.



Simultanément, cet état de fait me projette là, à cet instant, dans l’entrepôt, vide, noir, abandonné, obscur, je vois de l’intérieur les fenêtres murées et le très mince filet de lumière orangée des lampadaires qui filtre par les défauts des joints. Je sens la poussière et quelques débris d’oxydation et de verre crisser sous mes pieds. J’entends l’écho d’une gouttière, le bruissement léger, presque imperceptible, des chats errants, des oiseaux, des rats, des insectes qui logent ici. Et puis, les ouvriers reviennent au pas de charge, les images se superposent, et par-dessus l’entrepôt vide et obscur, en filigrane, apparaissent ces hommes, leur bruit, leur chaleur, la lumière uniforme des néons, les ateliers, les machines, les conversations, les exclamations, les appels.

Je cherche trop à savoir. Je suis un intrus.



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